26/05/2023
Fabien Roussel : « Le legs des “jours heureux” est toujours fécond »
Le programme du CNR demeure d’une actualité brûlante. Le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, y voit la « préfiguration de la perspective du communisme » qu’il s’agit de conjuguer au présent. Entretien.
Le 27 mai 1943, le Conseil national de la Résistance voyait le jour. Quel regard portez-vous sur ce moment de l’histoire de France qui a permis, dans la foulée de la Libération, de grandes conquêtes sociales ?
La reconquête de la République, portée par le programme du CNR, nous a légué un socle de conquêtes sociales dont nous restons les héritiers. Rarement la France aura connu un si grand nombre de transformations progressistes en si peu de temps.
Les forces de la Résistance se seront ainsi situées dans le prolongement de tous les combats populaires menés depuis la grande Révolution. Cela démontre que, lorsque le mouvement populaire est fort et uni, il peut rassembler la nation autour de réformes heureuses qui lui ouvrent un chemin de progrès, de justice, de démocratie, de paix.
La place des communistes est régulièrement minorée, comme celle d’Ambroise Croizat dans la création de la Sécurité sociale. Vous en revendiquez l’héritage. Pourquoi cette bataille est-elle importante ?
Pour une double raison. D’abord, la mémoire est une dimension essentielle de la bataille à recommencer en permanence afin que les forces du travail, le mouvement ouvrier, conservent au fil du temps la conscience de leur place dans la société et de la force dont elles disposent pour transformer la France en profondeur.
Ensuite, ce qu’on appelle le « pacte de la Libération », institué dans le cadre du gouvernement du général de Gaulle, est le fruit du poids du Parti communiste français dans la Résistance et dans le soulèvement populaire qui accompagna la Libération. Cela confirme, à mes yeux, un principe majeur : lorsque le PCF est fort et influent, cela change le destin de la France. Voilà pourquoi j’appelle à un renouveau du communisme français.
Vous avez fait du nom du programme du CNR votre slogan pendant la campagne présidentielle. Pourquoi avoir choisi les « jours heureux » ?
Parce que le temps des réformes régressives, punitives, à l’image de la réforme des retraites à 64 ans, doit finir. La globalisation capitaliste nous était, il y a peu, présentée comme un temps « heureux ». Elle s’est traduite, à travers la domination sans partage de gigantesques mastodontes multinationaux et des marchés financiers, par de multiples crises, économique et écologique, alimentaire et sanitaire, sociale et démocratique. Celles-ci placent la planète face à de terribles menaces.
Être à gauche aujourd’hui, c’est rouvrir au monde du travail, aux catégories populaires, un horizon d’espoirs. »
Le spectre de la guerre resurgit, les forces de la réaction, ici et partout dans le monde, attisent les haines, le racisme, les paniques identitaires. Alors, oui, être à gauche aujourd’hui, c’est rouvrir au monde du travail, aux catégories populaires, un horizon d’espoirs. C’est dire que le dépassement d’un modèle capitaliste dévastateur vise la naissance d’une civilisation enfin libérée de toutes les formes d’exploitation et d’aliénation.
Ce que des hommes et des femmes avaient pu imaginer en pleine clandestinité, alors qu’une chape de plomb et de mort s’était abattue sur le pays, il nous incombe de le faire à notre tour, dans les conditions d’aujourd’hui. Notre projet communiste, c’est le droit au bonheur reconquis.
Avec sa réforme des retraites, le gouvernement s’attaque à l’un des piliers de la Sécurité sociale au prétexte de « sauver le régime par répartition »…
Ils ne veulent pas le sauver, ils veulent achever de le démanteler. Non seulement rien n’impose une réforme d’une telle violence, alors qu’il existe d’autres solutions pour garantir un système plus juste, plus solidaire et plus efficace. Nous l’avons démontré en mettant sur la table une série de propositions en ce sens, à commencer par augmenter les salaires et créer des emplois.
Mais, avec cette réforme, on sait que les pensions vont baisser. Ils veulent, en plaçant les futurs retraités devant cette perspective angoissante, ouvrir aux géants de l’assurance privée un nouveau marché juteux en forçant celles et ceux qui le peuvent à mettre de côté 50 à 100 euros tous les mois afin de partir plus tôt en retraite. En lieu et place du principe de solidarité, ils veulent faire avancer leur très vieux projet de retraite par capitalisation.
De réforme en réforme, c’est non seulement la retraite mais aussi les assurances-maladie et chômage qui sont détricotées. L’objectif, au fond, n’est-il pas d’en finir avec un système qui met la réponse à certains besoins fondamentaux à l’abri de la loi du marché ?
En posant la règle générale de l’universalité de la protection sociale, le CNR puis l’ordonnance du 4 mars 1945 ont proclamé que chacune et chacun, « en toutes circonstances », disposerait « des moyens nécessaires pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes ». C’est l’exact contraire de la vision néolibérale, qui considère que l’on ne se protège, à toutes les étapes de la vie, qu’à la mesure de ce que l’on possède.
L’ordonnance du 4 mars 1945, qui a été mise en œuvre par Ambroise Croizat et les autres ministres communistes, porte un projet de société global qui fixe à la Sécurité sociale l’objectif de répondre « à la préoccupation de débarrasser les travailleurs de l’incertitude du lendemain, cette incertitude constante qui crée chez eux un sentiment d’infériorité et qui est la base réelle et profonde de la distinction des classes ». Et elle ajoute : « Le but final à atteindre est la réalisation d’un plan qui couvre l’ensemble de la population du pays contre l’ensemble des facteurs d’insécurité. »
C’est la préfiguration de la perspective du communisme qui veut porter l’exigence de la mise en commun contre toutes les tentations de repli sur soi et contre la volonté des pouvoirs en place de fragmenter la société.
Étendre cette logique à d’autres domaines, comme l’alimentation, est-il envisageable dans le cadre d’une économie mondialisée ?
En appelant à « une véritable démocratie politique et sociale », le CNR entendait, d’un même mouvement, assurer la protection du grand nombre contre les prédations d’un capital toujours plus avide de profits, et redonner à la France sa pleine souveraineté, industrielle, énergétique, alimentaire. Cette pression libérale sur notre agriculture s’accentue en France sous prétexte du dérèglement climatique.
Il suffit de lire la dernière recommandation de la Cour des comptes, qui remet en cause nos éleveurs de bovins. Ce débat, je l’ai mené lors de la présidentielle. Qu’il faille manger moins de viande, nous sommes d’accord, mais enfin, mangeons de la viande produite en France plutôt que celle qui est importée.
Depuis 2016, nous avons perdu 840 000 vaches. Mais nos importations représentent 20 % de la viande consommée en France. La souveraineté alimentaire, dans le respect de la planète, du bien-être animal, de nos campagnes et de nos agriculteurs, c’est essentiel et c’est toujours révolutionnaire.
Le CNR promouvait également « le retour à la nation des grands moyens de production monopolisés, fruit du travail commun, des sources d’énergie, des richesses du sous-sol, des compagnies d’assurances et des grandes banques », ainsi que « la sécurité de l’emploi ». Comment être à la hauteur de ces ambitions aujourd’hui ?
La visée d’une République sociale et démocratique, laïque et universaliste, féministe et écologiste, que j’ai portée dans la campagne présidentielle, voulait renouer le fil avec ces valeurs et exigences. En défendant la réappropriation sociale et publique des secteurs clés de l’économie et en préconisant la création d’un pôle financier public permettant à la collectivité de recouvrer la maîtrise de l’utilisation de l’argent.
En faisant le choix de la sécurisation de tous les moments de la vie, de la naissance à la retraite, à travers l’éradication du chômage et la priorité donnée à un travail retrouvant son sens émancipateur. En faisant de la Sécurité sociale le bien commun de ses cotisants et en redonnant à nos services publics les moyens d’être un levier d’émancipation individuelle et collective.
16:36 Publié dans ACTUALITES, PARTI COMMUNISTE FRANCAIS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fabien roussel, jours heureux, cnr | | Imprimer | del.icio.us | | Digg | Facebook | |
22/05/2023
« je préfère que l’on nourrisse la paix, plutôt que la guerre »
La loi de programmation militaire est examinée à l’Assemblée nationale à partir de ce lundi. Fabien Roussel s’est dit opposé à ce texte, appelant à un grand débat national avec les Français pour « qu’ils mesurent les choix » qui sont faits
Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste français, était l’invité de France Inter ce lundi 22 mai. Il a notamment jugé « honteux », le fait que le gouvernement puisse rejeter la proposition de loi du groupe Liot - qui doit être examinée à l’Assemblée nationale le 8 juin -, visant à abroger la réforme des retraites. « C’est rendre jusqu’au bout cette réforme des retraites à 64 ans, anti-démocratique, illégitime. Madame Borne n’a qu’à supprimer l’Assemblée nationale directement », a lancé Fabien Roussel, ajoutant qu’il fallait un vote sur ce texte de la réforme des retraites car, « il n’y en a pas eu », a-t-il rappelé, faisant allusion au 49.3 utilisé en mars pour faire passer ce texte.
Un grand débat national
Mais le sujet principal de cet entretien avec Fabien Roussel était la loi de programmation militaire, examinée à partir de ce lundi. En substance, le budget des armées pour les cinq ans à venir (2024-2030), un budget de 413 milliards d’euros, soit + 40 % d’augmentation par rapport au précédent texte. Le secrétaire national du PCF fait partie de la commission et évoque un budget « exceptionnel. C’est plus que le budget de la justice, de l’Éducation nationale, de la santé », affirme-t-il. D’après ce dernier, ce budget prévoit de bâtir une armée de projection pour avoir une guerre d’avance pour investir sur des terrains extérieurs, dans des conflits lointains et plus qu’« incertains », ajoute-t-il.
Fabien Roussel se dit opposé sur le fond à ce budget mais a tout de même tenu à s’expliquer. « Avoir un budget plus important, permettant de nous protéger des menaces, d’investir dans la recherche, oui et 1 000 fois oui. Permettre à nos soldats d’être mieux équipés, mieux entraînés, d’avoir des équipements modernisés oui, et la défense c’est important. En revanche, investir à ce niveau-là, quand on demande des efforts aux Français, pour bâtir une armée d’intervention sur des terrains extérieurs, c’est pour nous un sujet, nous appelons à un grand débat national avec les Français pour qu’ils mesurent les choix », précise Fabien Roussel.
« Le risque nucléaire n’a jamais été aussi présent »
Fabien Roussel a ensuite été interrogé sur la dissuasion nucléaire. « Elle a protégé le monde, elle a empêché la guerre en Ukraine ? » a-t-il demandé. « Il n’y a jamais eu autant d’argent mis dans l’arme nucléaire, sans pour autant empêcher de guerre ; en revanche le risque nucléaire n’a jamais été aussi présent avec un Poutine qui menace de l’utiliser », a affirmé Fabien Roussel.
Le secrétaire national du PCF s’est dit pour une armée « modernisée, permettant d’appréhender les nouvelles technologies, étant capable d’intervenir sur des terrains extérieurs et de protéger nos ressortissants, de protéger nos concitoyens, c’est essentiel. Mais de là à investir dans un porte-avions au service de qui, pourquoi, ça interroge », poursuit-il.
Selon lui, en faisant le choix du nucléaire et d’un porte-avions, le ministre de l’armée fait un mauvais choix. « Le président de la République a dit, ‘nous devons avoir une guerre d’avance’, je ne souhaiterais pas que l’on ait une paix de retard. Je préférerais investir dans la diplomatie et la paix que dans la course à l’armement et dans des guerres qui ne sont pas les nôtres », explique Fabien Roussel.
« Attention de ne pas franchir de ligne rouge pour qu’il n’y ait pas d’extension du conflit, que nous ne devenions pas demain des cobelligérants », a insisté Fabien Roussel au sujet de la guerre en Ukraine, revenant sur le sommet du G7, qui d’après lui, parle beaucoup d’alimentation du conflit. « Je préfère que l’on nourrisse la paix, plutôt que l’on nourrisse la guerre », a-t-il conclu.
19:03 Publié dans ACTUALITES, PARTI COMMUNISTE FRANCAIS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fabien roussel, budget armée | | Imprimer | del.icio.us | | Digg | Facebook | |
05/11/2022
REBATISSONS LA DIGUE REPUBLICAINE
12:11 Publié dans ACTUALITES, PARTI COMMUNISTE FRANCAIS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fabien roussel, racisme | | Imprimer | del.icio.us | | Digg | Facebook | |
14/09/2022
Fabien Roussel : « J’assume défendre le parti du travail »
En déclarant préférer le travail au chômage, je n’imaginais pas provoquer pareille polémique. Que n’avais-je dit ? Certains ont pris leurs plus beaux airs indignés et y ont vu une saillie inspirée des pires discours de la droite réactionnaire. D’autres sont allés jusqu’à s’élever contre un racisme à peine larvé. Quel délire !
Quand on parle des autres, on parle d’abord de soi. En s’indignant ainsi, que disent-ils d’eux-mêmes ? Qu’ils ont démissionné. Qu’ils ont renoncé à la grande ambition qui devrait rassembler la gauche : celle d’éradiquer le chômage. Si l’esclavagisme revenait demain, ils négocieraient avec le Medef le poids des chaînes. Pas moi. Car le chômage tue, il bousille des vies. Il fait basculer des familles entières dans la pauvreté. Il instille partout le venin de la division entre ceux qui ont un emploi et ceux qui en sont privés. De là où je vous parle, dans ce Nord ouvrier depuis si longtemps fier de ses usines et du savoir-faire de ses travailleurs, on sait la dureté du travail et le coût du chômage. On sait intuitivement que le chômage est « l’armée de réserve » du capital, comme le disait si bien Marx.
Remettre en cause la logique libérale du chômage
C’est la menace du chômage qui permet au Medef et aux libéraux d’imposer les bas salaires, les horaires élargis sans supplément de rémunération, le quotidien infernal d’une vie sans pause et sans plaisirs. Et nous devrions accepter le chômage de masse et nous contenter de garantir un revenu d’existence ? Il est temps, au contraire, de remettre en cause les logiques libérales qui ont toujours entretenu le chômage plutôt que de l’éradiquer, qui ont préféré l’accompagner plutôt que d’empêcher le déménagement de pans entiers de notre industrie.
Ouvrons les yeux. L’industrie représentait 24 % de notre PIB en 1980 et seulement 10 % en 2019. Notre flotte de pêche est passée de 11 500 bateaux, en 1983, à 4 500, aujourd’hui. Quant à la saignée paysanne, elle nous a fait passer de 1 263 000 exploitations agricoles, en 1979, à 429 000, en 2017. Résultat : 5 millions de privés d’emplois, 2 millions de bénéficiaires du RSA, 4,5 millions de primes d’activité versées par la CAF. Et 10 millions de Français sous le seuil de pauvreté. Beau succès.
Alors, j’assume. Je me bats pour une société qui se fixe comme horizon de garantir un emploi, une formation, un salaire à chacun de ses concitoyens. Et je m’inscris en faux contre ceux qui théorisent la « fin du travail ». Ce discours passe totalement à côté des réalités qui se font jour. Ayons de l’ambition pour notre pays.
Tant de besoins mériteraient d’être satisfaits. De quoi permettre à chacun de trouver sa place dans la société et de retrouver sa dignité par le travail.
Redonner du sens au travail
Regardez ces classes sans professeurs, ces trains qui ne circulent pas faute de conducteurs, ces services d’urgences fermés faute de personnels. Qui peut croire que nous relèverons le service public sans fonctionnaires en plus ? Qui peut imaginer que nous conduirons la transition écologique sans créer d’emplois ? Qui peut penser que nous pourrons reconquérir notre souveraineté énergétique, industrielle, alimentaire sans millions d’emplois supplémentaires ni formations massives ?
Bien sûr, à titre transitoire, les salariés ont besoin de protections, d’accompagnement et je serai à leur côté pour dénoncer toutes les attaques du gouvernement contre eux, avec cette réforme de l’assurance-chômage ou encore le projet de travail obligatoire en échange du RSA.
Mais quel beau défi pour un pays, pour la gauche, que de travailler à une société qui garantit à chacun d’avoir un emploi, une formation et un salaire tout au long de sa vie professionnelle. Un projet révolutionnaire qui va de pair avec l’amélioration des conditions de travail, la hausse des salaires, la réduction du temps de travail et le rétablissement de la retraite à 60 ans et vise à sécuriser tous les âges de la vie. Redonnons du sens au travail en l’émancipant de la puissance aveugle du marché et en se posant partout la question : comment produire et répondre à nos besoins, en respectant autant les êtres humains que la planète ? C’est l’ambition qui m’anime. Ni plus ni moins.
Fabien Roussel
Secrétaire national du PCF
18:25 Publié dans ACTUALITES, PARTI COMMUNISTE FRANCAIS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fabien roussel, travail | | Imprimer | del.icio.us | | Digg | Facebook | |
26/06/2022
AVEC FABIEN ROUSSEL, LE PCF A DE L'AVENIR
19:52 Publié dans PARTI COMMUNISTE FRANCAIS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pcf, fabien roussel | | Imprimer | del.icio.us | | Digg | Facebook | |
25/04/2022
PRESIDENTIELLE : DECLARATION DE FABIEN ROUSSEL
10:08 Publié dans ACTUALITES, PARTI COMMUNISTE FRANCAIS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : présidentielles, fabien roussel | | Imprimer | del.icio.us | | Digg | Facebook | |
11/04/2022
1er tour : Déclaration de Fabien Roussel
11:34 Publié dans ACTUALITES, PARTI COMMUNISTE FRANCAIS | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : présidentielle, pcf, fabien roussel | | Imprimer | del.icio.us | | Digg | Facebook | |